Anticiper l’avenir au niveau juridique

Il peut arriver que, suite à un accident ou à une maladie, nous n’ayons plus la capacité de prendre des décisions.

Que ce soit des décisions relatives à notre santé, des décisions relatives à la gestion de nos biens/de notre patrimoine, des décisions relatives au choix de notre lieu de vie ou encore à notre fin de vie (euthanasie, don d’organes, …).

Notre droit a prévu toute une série de « déclarations anticipées » que chaque personne peut remplir afin de faire part de ses choix et afin de désigner les personnes qui pourront prendre les décisions à sa place.

Il s’agit donc bien de la possibilité d’anticiper l’avenir en rédigeant des documents stipulant clairement nos choix et en désignant – à l’avance- la ou les personnes que nous souhaiterions voir être consultées pour que notre volonté soit respectée.

Nous reprenons ci-dessous les différentes démarches qui peuvent être effectuées.

Nous les avons classées en trois parties :

  • Au niveau des soins
  • Au niveau de la personne
  • Au niveau des biens

Une question ? N’hésitez pas à nous contacter au 081/22.85.98

 

1)    Au niveau des soins

    A- La loi sur les droits du patient :

C’est par une loi de 2002 que le patient s’est vu légalement reconnaître certains droits : droit à des prestations de qualité, droit au libre choix du praticien professionnel, droit à l’information sur son état de santé, droit au consentement libre et éclairé, droit à l’accès au dossier médical, droit à la protection de la vie privée et droit de porter plainte.

https://www.health.belgium.be/sites/default/files/uploads/fields/fpshealth_theme_file/patientenrechten_folder_fr_internet_0.pdf

Cette loi précise les caractéristiques de la relation entre le patient et le praticien professionnel et vise à améliorer la qualité des prestations de soins de santé.

Cette loi détermine également la/les personne(s) susceptible(s) de représenter les patients inca­pables d’exercer eux-mêmes leurs droits : la personne de confiance et le représentant.

  • Désignation d’une personne de confiance :

Cette personne peut être un membre de la famille, un ami, un autre patient ou toute autre personne désignée par le patient pour l’assister, l’aider à obtenir des informations sur son état de santé, à consulter ou à obtenir copie de son dossier ainsi qu’à porter plainte.

NB : La désignation de la personne de confiance peut se faire de façon informelle mais il peut être utile de signer un document écrit. Pour cela un formulaire type est disponible sur le site du SPF Santé publique :

https://www.health.belgium.be/sites/default/files/uploads/fields/fpshealth_theme_file/designation_personne_de_confiance.pdf 

  • Désignation d’un représentant / mandataire :

En cas d’incapacité de la personne, les droits du patient seront exercés par la personne que le patient aura préalablement désignée pour se substituer à lui.

Si le patient n’a désigné aucun représentant/mandataire, les droits du patient pourront être exercés par l’administrateur de la personne. Si aucun administrateur n’est habilité à représenter le patient, les droits seront exercés, en ordre subsidiaire, par l’époux cohabitant ou le partenaire cohabitant, l’enfant majeur, un parent, une sœur ou un frère majeurs (= système en cascade).

Un formulaire type est également disponible sur le site du SPF Santé publique : https://www.health.belgium.be/sites/default/files/uploads/fields/fpshealth_theme_file/designation_mandataire.pdf 

En cas de conflit entre plusieurs candidats représentants, par exemple entre plusieurs enfants du patient, ou à défaut de représentant, ce sera le praticien professionnel qui exercera les droits du patient incapable.

NB : Les documents par lesquels le patient aura désigné une personne de confiance et/ou un représentant légal sont à déposer dans le dossier du patient.

  • Déclaration de volonté anticipée de soins

Lorsque le patient se trouve dans un état de santé l’empêchant d’exprimer sa volonté (ex. coma, maladie neurologique), le praticien doit respecter la déclaration de volonté anticipée rédigée par le patient lorsqu’il était encore à même d’exercer ses droits. Dans cette déclaration anticipée, le patient a fait savoir, par exemple, qu’il refuse son consen­tement à une intervention déterminée (exemple : souhaite de ne pas être intubé ou de ne pas entrer aux soins intensifs). Il est préférable de rédiger cette déclaration de volonté en présence d’une tierce personne (ex. un médecin) afin d’éviter des dérives d’interprétation. La déclaration n’est pas limitée dans le temps, à moins d’une révo­cation par le patient à un moment où il est en mesure d’exercer ses droits.

Cette déclaration est à conserver dans le dossier du patient.

    B- Le Projet de soins personnalisé et anticipé (PSPA)

Ce projet est né d’un constat des professionnels accompagnant les personnes en fin de vie : les patients comme les aidants proches et les soignants semblaient plus sereins quand des mots avaient été mis sur les souhaits liés aux soins, aux volontés. Mais très vite, il est apparu que susciter ce dialogue, cette réflexion n’était pas une tâche facile…. Le projet de créer un support à la démarche était né. Bien plus qu’une déclaration de volonté anticipée, le PSPA s’inscrit dans une démarche globale, « Faire entendre sa voix jusqu’au bout de la vie », qui intègre l’histoire, les valeurs et qui est balisée par le cadre légal. Son utilisation par les professionnels doit s’envisager dans le cadre institutionnel et être guidée par un accompagnement formatif.

Pour plus d’information voir le site de Pallium (portail des soins palliatifs en Wallonie) : https://www.soinspalliatifs.be/pspa.html

2)    Au niveau de la personne

    A- Le mandat extra-judiciaire

La protection extrajudiciaire prend la forme d’un mandat : vous restez capable et chargez une autre personne (le mandataire) d’accomplir tel ou tel acte en votre nom et pour votre compte.

Attention, vous devez encore être capable d’exprimer votre volonté pour faire établir un mandat extrajudiciaire car vous devez être pleinement conscient des actes que vous réalisez dans votre intérêt.

Vous pouvez choisir la date à laquelle le mandat prend cours : soit immédiatement alors que vous êtes encore capable, soit à partir du moment où vous êtes incapable d’accomplir certains actes. Vous désignez alors la personne de votre choix (le mandataire) qui pourra vous représenter pour les actes de gestion et d’administration de tout ou partie de vos biens. C’est le mandataire qui appréciera le moment où vous devenez incapable. Conseil : fixez des modalités avec votre mandataire en prévoyant par exemple que votre mandataire devra produire un certificat médical afin d’établir que vous êtes devenu incapable. 

Initialement, le mandat ne pouvait porter que sur des actes relatifs à vos biens (et pas sur des actes relatifs à votre personne) : opération bancaires, gestions de vos revenus, vente d’un de vos biens immobiliers, planification de votre succession (donation de biens meubles ou immeubles, partage, …) participation à des assemblées générales de copropriétaires ou d’actionnaires, paiement d’une dette, etc. Le mandataire devra respecter les instructions éventuelles que vous avez émises dans le mandat. Vous pouvez ainsi, si vous le souhaitez, limiter les actes qui pourront être posés par votre mandataire.

Depuis le 1er mars 2019, le champ d’application du mandat extrajudiciaire est élargi : il peut porter non seulement sur des actes relatifs au biens, mais également sur des actes de représentation relatifs aux personnes, et sur des actes de gestion. Vous pouvez ainsi par exemple prévoir qui aura accès à votre maison lorsque vous ne pourrez plus en décider par vous-même, ou indiquer dans quelle maison de repos ou établissement de soins vous souhaiteriez vous rendre.

Le mandat peut être conclu sous seing privé (entre le mandant et le mandataire, sans l’intervention d’un notaire) mais, dans la plupart des cas, il est conseillé de passer un acte notarié et donc de vous rendre chez un notaire. Le notaire vous aidera à rédiger le mandat : à décrire la portée de celui-ci (mandat général ou actes limités). Il vous aidera garder à l’esprit ce qui est important pour vous, sans vous perdre dans une foule de détails qui limiteraient inutilement la liberté d’action du mandataire. Le notaire veille aussi à ce que le mandat serve réellement les intérêts de la personne protégée.

Attention, pour être valable, le mandat doit être enregistré au Registre central des contrats de mandat (qui est géré par la Fédération Royale du Notariat belge).

Pour plus de renseignements : lien vers le site du notariat belge :

https://www.notaire.be/nouveautes/detail/comment-anticiper-son-avenir

   B- La protection judiciaire (désignation d’un administrateur de la personne)

Il est possible pour une personne de faire une déclaration de préférence devant un notaire ou un juge de paix dans laquelle elle indique « qui » elle souhaiterait voir désigné comme administrateur de biens et/ou de la personne au cas où elle ne serait plus en état de prendre des décisions relatives à ses biens et à sa personne. Cette déclaration est aussi appelée déclaration préalable.

Cette déclaration peut être faite devant le notaire ou le juge de paix et devra être déposée au Registre central des Déclarations tenu par la Fédération royale du notariat belge. Le Juge de paix ne peut y déroger que pour des motifs graves.

Pour rappel, l’administrateur de la personne pourra notamment décider d’un changement de lieu de vie de la personne protégée. Cela avec l’accord du Juge de paix.

Lien vers les brochures éditées par la Fondation roi Baudouin et la Fédération des notaires sur le sujet :

https://kbs-frb.be/fr/proteger-la-personne-et-son-patrimoine#:~:text=Cette%20brochure%2C%20%C3%A0%20l’%20initiative,de%20leur%20patrimoine%20ou%20de

https://kbs-frb.be/fr/un-guide-pratique-pour-aider-les-administrateurs-familiaux

https://www.notaire.be/nouveautes/detail/que-faire-lors-du-deces-dun-proche-un-guide-pratique-dans-les-moments-difficiles

    C- L’euthanasie

La rédaction d’une déclaration anticipée d’euthanasie est possible. Elle peut être faite, révisée et annulée à tout moment. Elle ne doit plus être renouvelée tous les 5 ans. Toute personne capable juridiquement peut consigner par écrit sa volonté concernant l’euthanasie.

Le rédacteur de cette déclaration exprime le vœu, au cas où il ne serait plus en mesure d’adresser une demande d’euthanasie à un médecin, que le médecin pratique l’euthanasie dès que les conditions légales sont remplies. Les conditions pour pratiquer l’euthanasie sont les suivantes : la personne doit être atteinte d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable. Elle doit être inconsciente et cette situation doit être irréversible selon l’état de la science

Cette déclaration anticipée doit se faire devant deux témoins et être constatée par écrit. La personne qui fait cette déclaration peut également désigner une ou plusieurs personnes de confiance. Son rôle sera de mettre le médecin au courant de la volonté du patient ou d’être contactée par le médecin dans la phase qui précède l’euthanasie.

Elle peut être enregistrée à l’administration communale du domicile de la personne. L’administration communale l’enregistrera alors dans une banque de données centrale du SPF Santé Publique consultable par tout médecin confronté par des demandes d’euthanasie.

Le formulaire de déclaration anticipée d’euthanasie est téléchargeable sur le lien suivant :

https://www.health.belgium.be/sites/default/files/uploads/fields/fpshealth_theme_file/formulaire_de_declaration_euthanasie.pdf

    D- Don d’organes

Depuis la loi du 14 juin 2006 vous pouvez faire inscrire votre volonté ou refus d’être un donneur d’organes. La procédure est simple et gratuite. Il suffit de remplir et de signer le formulaire d’inscription concernant le don d’organes à la commune. Le formulaire est automatiquement transmis au registre national. Cela permet d’éviter les conflits avec et au sein de la famille.

Pour information, le donneur d’organes n’est PAS mis à la disposition de la science. Les organes et les tissus prélevés le seront UNIQUEMENT à des fins de transplantation chez des individus en attente d’une transplantation.

Le prélèvement fini, le corps sera rendu à la famille dans les délais les plus brefs.

    E- Don de son corps à la science

Léguer son corps à la science au jour de son décès consiste à mettre son corps intégralement à la disposition de la médecine dans un but scientifique ou pédagogique (formation, recherche scientifique).

La personne qui souhaite faire don de son corps à la science doit obligatoirement exprimer cette volonté de manière claire et non équivoque dans un document écrit de sa main, daté et signé. L’original de ce document doit être envoyé à l’hôpital universitaire choisi qui renverra une attestation de réception de la promesse et une carte de donateur qui devra être annexée aux documents d’identité voire, le cas échéant, à la déclaration de dernières volontés ou transmise à une personne de confiance.

Lors de la déclaration du décès à la commune, les proches ou la personne de confiance remettront copie de la carte de donateur et/ou du document attestant de sa volonté de faire don de son corps à la science. Il s’agit d’un don purement gratuit. Aucune contrepartie financière ne sera donc octroyée au futur défunt, à ses proches ou à ses héritiers.

Une fois le décès constaté, il y aura lieu de prévenir le plus rapidement possible l’hôpital concerné étant donné que le transfert de la dépouille (En cercueil et en corbillard) doit avoir lieu au plus tard dans les 48 heures (voir 72 heures) du décès.

Une fois les travaux scientifiques terminés, le corps n’est pas rendu à la famille et il doit obligatoirement être inhumé ou incinéré.

L’hôpital se chargera d’organiser les funérailles en tenant compte des éventuelles dernières volontés du défunt. Généralement, l’hôpital laisse la possibilité et la liberté à la famille et aux proches d’être présents lors de l’inhumation ou de l’incinération et les informe du lieu où repose le défunt.

    F- Déclaration de volonté en matière de sépulture et d’obsèques

Toute personne a le droit de son vivant de choisir son mode de sépulture et d’obsèques, pour cela vous devez en informer l’officier d’état civil de la commune où vous résidez.
Vous devez compléter une déclaration qui sera enregistrée au registre central des dispositions de dernières volontés, /testament/notaire ou registre national des personnes physique
Personne ne peut s’opposer à ce choix.

Par ailleurs, vos souhaits peuvent également être transmis à un membre de la famille, une personne de confiance, à votre mandataire, au notaire, à l’entrepreneur de pompes funèbres, via une simple lettre. Il est possible de modifier vos volontés à tout moment.

3)    Au niveau des biens

    A- Le mandat extra-judiciaire

Voir ci-dessus : 2.A

    B- La protection judiciaire (désignation d’un administrateur de biens)

Voir ci-dessus : 2.B

    C- Testaments

Il est possible pour une personne d’établir un testament afin de déterminer qui recevra quelle part de son patrimoine. Grâce au testament, il est possible de déterminer la part de chacun, en respectant tout de même les règles relatives à la réserve et la quotité disponible.

Il existe trois manières de faire un testament :

  • Le testament authentique, ou testament notarié, dicté à un notaire, qui en dresse un acte. Le testateur dicte ses volontés au notaire, en présence de deux témoins, ou d’un deuxième notaire.
  • Le testament olographe, est celui que le testateur écrit seul. La loi précise que ce testament n’est assujetti à aucune autre formalité. Cependant, pour être valable, il doit remplir les trois conditions suivantes :- Etre écrit en entier de la main de celui qui l’établit.
    – Etre daté.
    – Etre signé de sa signature habituelle.
  • Le testament international, plus complexe, mais qui peut être exécuté dans tous les pays qui ont ratifié la convention adoptant cette forme internationale de testament. Il nécessite l’intervention d’un notaire assisté de deux témoins. Ce testament peut être dactylographié. Il peut avoir un caractère de secret absolu. Le testateur doit remettre le testament dans une enveloppe au notaire, ou s’il le remet hors enveloppe, le notaire le place dans une enveloppe scellée. Le notaire doit écrire sur cette enveloppe un acte certifiant qu’elle contient le testament qui lui a été remis par le testateur, et y joint une attestation, de valeur internationale, quant au contenu de l’enveloppe.

Sources : Site Notaire.be : https://www.notaire.be/donations-successions/les-successions/etablir-un-testament


NB : Plusieurs associations ont collationné les informations et des modèles-types de déclarations anticipées. Vous pouvez retrouver notre tableau récapitulatif des déclarations de volonté anticipées en cliquant ici.

Nous renvoyons le lecteur vers ces différentes sources d’informations :